À seulement deux jours d’intervalle, le 6 mars, le président américain annonce suspendre jusqu’au 2 avril ces frais de douane, « par égard » pour son homologue mexicaine. Ce revirement de situation se réalise non sans conditions pour le Mexique.
En janvier 2025, alors que la menace douanière pesait déjà sur le Mexique, Claudia Sheinbaum avait œuvré pour éviter les taxes en répondant aux exigences de Trump. En deux mois, son gouvernement a renforcé le contrôle de l’immigration, réduisant de 66 % les flux migratoires irréguliers grâce au déploiement de 10 000 soldats supplémentaires à la frontière mexicaine. La lutte contre les cartels s’est intensifiée avec d’importantes saisies de fentanyl et l’extradition de 29 narcotrafiquants recherchés par le gouvernement américain, dérogeant à ses propres lois en la matière.
Accusée d’avoir noué une alliance avec les cartels de drogue mexicains, Sheinbaum avait démenti « la calomnie de la Maison Blanche » tout en parvenant à établir une discussion avec Washington dont l’issue a conduit au report de l’application des taxes. En contrepartie, Mexico a affirmé devoir réévaluer ses droits de douane sur les produits chinois, confortant ainsi les États-Unis dans la rivalité commerciale sino-américaine. Néanmoins, cet alignement économique ne traduit pas une entière soumission politique, l’influence américaine trouvant certaines limites dans les affaires politico-économiques du Mexique. La présidente Sheinbaum a rejeté catégoriquement toute tentative d’ingérence sur le territoire mexicain, réaffirmant que « la souveraineté n’est pas négociable ». Lorsque Trump avait envisagé l’éventualité d’une intervention militaire au Mexique pour lutter contre le narcotrafic, Sheinbaum avait rappelé « eux sur leur territoire, nous sur notre territoire ».
En ce sens, le 11 mars 2025, le Parlement mexicain a adopté une réforme de la Constitution visant à sanctionner les ingérences étrangères. L’idéal d’indépendance revendiqué par le Mexique contraste pourtant avec la réalité. Tandis que Trump rebaptise le golfe du Mexique en « golfe d’Amérique », réaffirmant sa volonté impérialiste et l’ambition de perpétuer la doctrine Monroe de non-ingérence en Amérique, le Mexique multiplie les initiatives conciliantes. Le pays craint la remise en exécution de taxes douanières, un risque vital pour l’économie mexicaine fortement dépendante des États-Unis, qui représentaient en 2024, 83 % de ses exportations.