La dissolution du PKK par Öcalan marque-t-elle la fin d’un combat ou le début d’une métamorphose ?

La dissolution du PKK par Öcalan marque-t-elle la fin d’un combat ou le début d’une métamorphose ?

Le chef de file du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), Abdullah Öcalan , dit Apo – qui signifie « oncle » en kurde – a appelé le jeudi 27 février 2025 au désarmement et à la dissolution du mouvement armé. Fondé en 1978 par Öcalan et un groupe d’étudiants, le PKK s’est imposé comme une organisation nationaliste, portée par une idéologie laïque et marxisante, revendiquant une autonomie accrue ainsi qu’une reconnaissance des droits politiques et culturels des Kurdes.

Condamné le 28 avril 1999 pour « trahison à la nation » par la justice pénale turque, Apo a lancé son appel pour « la paix et une société pacifique » depuis l’île-prison d’Imrali, exhortant les membres du PKK à déposer les armes et à se réunir en congrès pour entériner sa dissolution.

Cet appel marque un tournant dans le conflit entre le PKK et la Turquie. Il constitue une opportunité inédite de mettre fin à quarante ans de guérilla. La disparition du PKK en tant qu’organisation militaire ne signifie pas pour autant la fin des revendications kurdes. Pour Abdullah Öcalan, l’avenir du mouvement réside moins dans sa dissolution que dans sa transformation. Abandonner la lutte armée permettrait d’échapper à son statut de groupe terroriste et de lever la répression qui pèse sur lui. Cela inclurait notamment la libération des prisonniers politiques – comme l’ex-président général du Parti démocratique des peuples (HDP), Selahattin Demirtaş, incarcéré depuis plus de huit ans – et l’assouplissement des lois antiterroristes, souvent utilisées pour museler l’opposition pro-kurde.

Longtemps perçu comme une menace existentielle par le pouvoir turc, le PKK est considéré comme un facteur de déstabilisation interne et un risque pour l’unité territoriale du pays. Une évolution vers une organisation civile et politique offrirait au mouvement une légitimité institutionnelle et ouvrirait la voie à un dialogue avec Ankara. Déjà en 1999, Apo déclarait que « l’option démocratique est la seule alternative pour résoudre la question kurde ». Cette évolution se reflète aujourd’hui dans la montée en puissance du Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples (DEM, ex-HDP), qui représente aujourd’hui 10 % des sièges à la Grande Assemblée nationale de Turquie. 

L’appel du chef historique du PKK à dissoudre son mouvement ne doit rien au hasard. En octobre 2024, le leader ultranationaliste turc, Devlet Bahçeli, allié de Recep Tayyip Erdoğan, a tendu la main aux députés du DEM puis à Abdullah Öcalan. En coulisses, d’aucuns voient dans cette initiative pro-kurde une manœuvre visant à diviser l’opposition au président turc. Ce dernier cherche de nouveaux alliés afin de promouvoir une réforme constitutionnelle pour lui permettre de briguer un nouveau mandat à la tête du pays en 2028.

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