Pourquoi les discours masculinistes séduisent-ils une partie des jeunes hommes en quête d’identité ?

Au cœur du combat féministe contemporain, la remise en cause du patriarcat, responsable des inégalités et de la domination systémique, trouve des résistances. Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes relève dans son “baromètre sexiste” de 2024 que les jeunes hommes de 25 à 34 ans tendent vers des discours masculinistes visant à promouvoir le genre masculin au détriment du féminin. À titre d’exemple, 29 % d’entre eux pensent “que les hommes sont plus performants dans les carrières scientifiques”, contre 11 % pour les femmes du même âge et 12 % pour les hommes de 50 à 64 ans. Ces discours masculinistes sont notamment propagés par des influenceurs qui en ont fait leur spécialité, trouvant leur audience chez des jeunes hommes développant une haine des femmes.

“Il est devenu presque illégal d’être masculin”, déclare le youtubeur La Menace, possédant plus de 600 000 abonnés. Entre deux vidéos exaltant la “vie de millionnaire” montrant des voitures de luxe et des hôtels 4 étoiles à Dubaï, l’influenceur publie des podcasts où il débat de sujets de société, comme avec le vidéaste d’extrême droite Papacito. Ces discours rentrent en contradiction avec une parole féministe qui vise à dénoncer des comportements masculins jugés toxiques, à l’image de la domination d’un homme sur une femme dans une relation de couple. L’influenceur Alex Hitchens avait par exemple déclaré : “Une femme, après 22 h, qu’est-ce qu’elle fout dehors ?”, exprimant ici une volonté de contrôle sur la vie des femmes. Les principaux destinataires de cet antiféminisme sont les jeunes hommes de 25 à 34 ans, touchant particulièrement ceux éprouvant du mal-être.

En effet, l’anthropologue Mélissa Blais met en corrélation la surexposition des jeunes à l’anxiété avec le masculinisme. Ces hommes se retrouvent alors séduits et rassurés par des vidéos faisant la promotion d’une masculinité assumée, dont leur souffrance proviendrait de féministes voulant les oppresser. 13 % d’entre eux affirment qu’il est aujourd’hui “plus difficile d’être un homme que d’être une femme”, alors les solutions à leur tristesse se régleraient en retrouvant leur masculinité. Cela passe par des formations en séduction, des programmes de musculation et par des formations en cryptomonnaie. Les influenceurs masculinistes promettent, par la réaffirmation de leur identité de genre, de retrouver du sens dans leur vie en ayant de l’argent et des femmes.

La philosophe Juliette Grange pointe la dangerosité de ces discours, notamment ceux qui tirent vers une “intersectionnalité des haines”. S’adressant majoritairement à des hommes blancs, la chercheuse relève que ces discours ne s’attaquent pas uniquement aux femmes, mais relèvent parfois aussi de paroles xénophobes, LGBTphobes ou encore islamophobes. On parle alors de “néo-virilisme”, concept pouvant englober ce croisement des haines envers des minorités, participant à alimenter les sympathisants de ces groupes et les partis d’extrême droite.

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