Schuldenbremse : Friedrich Merz lève un tabou budgétaire en Allemagne

En quoi la réforme budgétaire allemande peut-elle transformer l’équilibre économique et politique du pays ?

Schuldenbremse : Friedrich Merz lève un tabou budgétaire en Allemagne

En quoi la réforme budgétaire allemande peut-elle transformer l’équilibre économique et politique du pays ?

Face à la crise structurelle du modèle allemand, le futur chancelier conservateur Friedrich Merz brise un tabou en proposant de lever l’interdiction constitutionnelle du frein à la dette. Entrée en récession il y a deux ans, l’Allemagne affronte une triple crise : sa dépendance au parapluie américain, au gaz russe et aux exportations chinoises – toutes remises en cause aujourd’hui. Tout cela a affaibli la troisième puissance économique mondiale, imposant un changement de cap drastique et des investissements publics massifs.

La remise en question nécessaire du dogme de l’austérité budgétaire, si cher à l’Allemagne, par l’abandon de la sacro-sainte règle du frein à la dette (« Schuldenbremse ») marque un virage à 180 degrés dans l’histoire économique allemande.

Inscrite dans la Constitution en 2009 sous le premier gouvernement d’Angela Merkel, la Schuldenbremse, régie par les articles 109 et 115, limite le déficit annuel de l’État fédéral à 0,35 % du PIB, hors circonstances exceptionnelles, et interdit aux Länder de s’endetter. Face à l’urgence de rebâtir la Bundeswehr (armée allemande), la coalition d’Olaf Scholz avait déjà contourné cette contrainte en 2022 via le plan Zeitenwende, doté de 100 milliards d’euros, en recourant à des mécanismes hors budget. Mais c’est bien le frein constitutionnel à l’endettement qui a précipité la chute du gouvernement Scholz sur le budget 2025, après l’invalidation par la Cour Constitutionnelle d’un contournement similaire pour financer la transition énergétique.t.

Aujourd’hui, les étoiles semblent s’aligner pour Friedrich Merz. Plus de 59 % des Allemands soutiennent cette réforme, et un accord CDU/CSU-SPD-Verts a été conclu, garantissant la majorité des deux tiers nécessaire au Bundestag pour modifier la Constitution. Merz veut capitaliser sur ce Bundestag (Parlement) sortant, encore favorable à cet accord, ce qui serait impossible avec la montée en puissance aux dernières élections de Die Linke (extrême gauche) et de l’AFD (extrême droite). Le texte prévoit d’exonérer du frein à la dette toutes les dépenses liées à la défense, aux services secrets, à la cybersécurité, à la protection civile et à l’aide à l’Ukraine, dès lors qu’elles dépassent 1 % du PIB, soit environ 44 milliards d’euros.) Les Länder pourront désormais s’endetter à hauteur de 0,35 % du PIB. Enfin, un fonds spécial de 500 milliards d’euros, sur douze ans, sera créé pour financer les infrastructures de transport, d’énergie et d’éducation. Sur ce montant, 100 milliards iront aux Länder et 100 autres milliards à un fond spécial pour la protection du climat.

Par ce plan, l’Allemagne mène une refondation de sa puissance face aux perturbations géopolitiques qui menacent l’Europe. D’après l’Institut allemand de l’économie (DIW), le fonds spécial de 500 milliards d’euros pourrait, à lui seul, générer 2 % de croissance en plus, en moyenne, au cours des dix années à venir.

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