La formation du gouvernement d’Ahmed al-Sharaa est-elle un vrai tournant démocratique en Syrie ou une opération de façade ?

Ahmed al-Sharaa a été désigné président intérimaire de la Syrie en janvier 2025, après la chute du régime de Bachar al-Assad. Nommé par rebelles et civils, Al-Sharaa, ancien chef islamiste du Hayat Tahrir al-Sham (HTS), tente de se refaire une image pour guider la Syrie après Assad. En mars 2025, il a annoncé la formation d'un gouvernement de transition dont les membres représentent une diversité ethnique et religieuse, mais qui est encore dominé par ses partisans. Ce gouvernement prépare une nouvelle constitution et des élections dans cinq ans, tandis qu’al-Sharaa tente d’assurer la stabilité et d’obtenir une reconnaissance internationale, malgré un pouvoir fragile. Mais son passé radical et les divisions internes menacent la pérennité du projet.

Né en 1982 à Riyad, Ahmed al-Sharaa, connu auparavant sous le nom d’Abu Mohammad al-Jolani, a dirigé Hayat Tahrir al-Sham (HTS), un groupe islamiste issu d’al-Qaïda, avant de s’emparer du pouvoir en décembre 2024. Il cherche depuis à se repositionner comme dirigeant modéré pour accompagner la transition syrienne. Le 29 mars 2025, al-Sharaa a annoncé la formation d’un gouvernement de transition de 23 ministres, incluant des représentants des différentes communautés syriennes : un Kurde, une Chrétienne, un Alaouite et un Druze. Cette composition semble viser à refléter les équilibres communautaires.

La constitution temporaire signée le 13 mars encadre la transition sur cinq ans, conservant la charia comme socle juridique tout en annonçant des libertés fondamentales. Toutefois, des critiques,  notamment des Kurdes, soulignent son manque de représentativité . Kenneth Roth, ancien directeur de Human Rights Watch, a averti que les pouvoirs étendus accordés au président risquent de compromettre l’État de droit et les droits humains. Ahmed al-Sharaa cherche à obtenir la reconnaissance internationale et la levée des sanctions. En avril 2025, sa rencontre avec des membres du Congrès américain, suivie de son invitation au sommet de la Ligue arabe à Bagdad, et de sa rencontre avec Emmanuel Macron à l’Élysée témoignent de ses efforts pour légitimer son pouvoir. Cependant, ces démarches, conditionnées par des garanties sur les droits humains et la protection des minorités, révèlent une transition fragile, marquée par des tensions régionales. Bien qu’elles témoignent d’efforts de conciliation, la nature de son projet politique reste incertaine.

Le gouvernement d’Al-Sharaa tente de concilier ses ambitions de transition politique avec les réalités du terrain. Si la diversité ministérielle et les engagements internationaux suggèrent un changement, la concentration du pouvoir et les critiques internes soulèvent des doutes. De plus, des violences communautaires dans l’ouest du pays, ayant fait plus de 800 morts, interrogent sur la sincérité de l’ouverture affichée. L’avenir du régime reste incertain, suspendu entre rupture et héritage autoritaire.

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