Face à ces contraintes, les pays du Mercosur se tournent davantage vers l’Asie, et notamment la Chine qui s’affirme comme un partenaire majeur. Elle absorbe 27 % des exportations agricoles de la région, loin devant les 12 % de l’UE. Cette stratégie leur permet de diversifier leurs partenariats économiques et de réduire leur dépendance vis-à-vis de l’Europe.
Les tensions entre l’Union européenne et le Mercosur reposent sur des divergences structurelles. L’UE, influencée par des mouvements écologistes et des États comme la France, exige des garanties environnementales et sociales accrues, notamment depuis le mandat de Jair Bolsonaro. En décembre 2023, un projet de traité a proposé des engagements renforcés en matière de développement durable, incluant des clauses sur la déforestation et des mécanismes de suivi. Cependant, la France et d’autres États européens jugent ces mesures insuffisamment contraignantes, craignant des impacts sur la souveraineté alimentaire européenne et le secteur agricole.
Pour le Mercosur, ces exigences sont perçues comme des obstacles protectionnistes limitant l’accès au marché européen. Cette tension reflète un équilibre fragile entre ouverture économique et protection environnementale. Sur le plan géopolitique, les défis internes et externes de l’UE, comme le Brexit, les mouvements populistes et la guerre en Ukraine, affaiblissent sa position mondiale. Le Brexit, notamment, a largement réduit son poids économique, selon une analyse de la Société Universitaire Européenne de Recherches Financières, rendant le bloc moins attractif face à des partenaires comme la Chine. Depuis 2009, cette dernière est devenue le premier partenaire commercial du Brésil devant les États-Unis, absorbant aujourd’hui 30,7 % de ses exportations.
Les pays du Mercosur renforcent aussi leurs liens avec l’Asie via des accords de libre-échange, à l’instar de l’accord signé fin 2023 avec Singapour. Ces partenariats pragmatiques permettent au Mercosur de maximiser les opportunités offertes par une économie multipolaire. Les tensions UE-Mercosur rappellent les défis rencontrés avec l’accord UE-Canada (CETA). Bien que ce dernier exemple ait démontré la capacité de l’UE à surmonter ses divisions, les divergences avec le Mercosur restent plus profondes. Pour rester compétitive, l’UE devra assouplir son approche et intégrer les spécificités économiques de ses partenaires.