Le “cinéma de l’intime” de Joachim Trier

Comment Joachim Trier met-il en scène l’intime dans sa trilogie d’Oslo ?

Joachim Trier est un réalisateur norvégien, connu pour sa trilogie d’Oslo qui comprend Reprise (2006), Oslo 31 août (2011) et Julie en 12 chapitres (2021). Ces 3 films abordent des personnages en crise émotionnelle, mentale ou existentielle, dont le parcours est marqué par la quête de sens et la solitude. L’intérêt principal du réalisateur norvégien est “le comportement humain et le sentiment d’identification avec un personnage qui lutte de manière interne, pour ainsi pénétrer dans l’ambivalence du personnage et des problèmes psychologiques complexes”. Les trois films de la trilogie illustrent cette volonté, avec une représentation brute des cheminements internes et les relations intimes dans toute leur complexité et leur imprévisibilité.

Reprise (2006) raconte narre l’histoire de deux jeunes hommes cherchant à devenir des auteurs reconnus, l’un d’eux est hospitalisé en raison de sérieux problèmes psychologiques, notamment de psychose déclenchée par un amour obsessionnel. Oslo, 31 août (2011) suit la dernière journée d’un homme qui vient de sortir de cure de désintoxication. Et Julie en 12 chapitres (2021) raconte le parcours d’une femme à la fin de la vingtaine, qui cherche à définir son identité et la vie qu’elle souhaite mener.

La ville d’Oslo est ici un lieu familier et intime, soulignant l’univers intérieur des personnages. Pour faire la scène d’introduction d’Olso 31 août, Joachim Trier a fait de nombreuses interviews en demandant aux gens de leurs conter leurs souvenirs dans la ville, à la manière de George Pérec dans « Je me souviens ». À la manière des protagonistes, la ville évolue : dans la scène d’introduction d’Oslo 31 août, la capitale apparaît comme saturée de souvenirs et de vie, tandis qu’à la fin du film elle semble complètement vidée.

La narration de ses films est fragmentée et non linéaire, avec l’utilisation de différentes lignes temporelles, de flashbacks par exemple, ce qui permet de s’immerger complètement dans le ressenti subjectif des protagonistes. Dans une interview pour Mubi (2023) le réalisateur aborde une scène de Julie en 12 chapitres dans laquelle le temps s’arrête, en expliquant que cette sensation était réelle pour la protagoniste, d’où l’importance de la mettre en image même si elle n’est pas « objectivement réelle ». Le réalisateur explore ce qui est à moitié vrai, à moitié imaginé, au moment où l’imaginaire et la réalité fusionnent. On voit également cela dans Reprise (2006), où parfois les dialogues se superposent aux images, se rejoignant sporadiquement avec les mouvements des lèvres des personnages avant de se décaler à nouveau. Ces scènes émotionnellement intenses sont présentées comme elles pourraient être retenues, avec un souvenir flou mais dont certains détails ont une grande importance.

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